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« Erasmus de l’apprentissage » : faciliter la mobilité des alternants en Europe

Antoine Pennaforte, maître de conférences HDR en GRH, Conservatoire national des arts et métiers

Publié le 5 avril 2024 Mis à jour le 24 avril 2024

Peu de jeunes le savent mais l’apprentissage peut être l’occasion de vivre une expérience à l’international et la loi du 27 décembre 2023 vise à faciliter ce type de mobilité.

« Erasmus de l’apprentissage » : faciliter la mobilité des alternants en Europe

« Erasmus de l’apprentissage » : faciliter la mobilité des alternants en Europe

Fin novembre 2023, la France comptait 824 700 étudiants en apprentissage. Entre 2012 et 2023, le nombre de contrats de ce type aurait ainsi triplé. L’apprentissage, qui met en lien l’expérience professionnelle développée par le jeune sur un lieu de production et les enseignements qu’il reçoit en centre de formation, a donc bel et bien le vent en poupe en France.

Si cette modalité de formation s’est historiquement déclinée à l’international pour certaines communautés comme les Compagnons du Devoir, les perspectives qu’elle offre de vivre une expérience à l’étranger demeurent peu connues. Or, de la Déclaration de Copenhague en 2002 émanant de l’Union européenne à celle d’Osnabrück en 2020, l’apprentissage s’est ouvert à l’international, notamment à travers le programme Erasmus+.

En France, avec la loi du 27 décembre 2023 pour un Erasmus de l’apprentissage visant à faciliter la mobilité internationale des alternants, l’objectif serait de dépasser le cap des 2 % des apprentis qui effectuent chaque année une mobilité internationale.

Développer un « capital mobilité »

Développer la mobilité en apprentissage relève d’une certaine gageure au regard des nombreuses parties prenantes (centre de formation, apprentis, organisation d’accueil), des enjeux légaux (continuité de protection sociale), comportementaux (socialisation, fidélisation), organisationnels (continuité du tutorat), culturels (langue), réglementaires (contrat de travail ; standardisation des crédits de formation et d’expérience) et financiers (rémunération) associés.

Ces enjeux pris en compte, les bénéfices de la mobilité internationale des apprentis sont nombreux comme le montrent de nombreuses expériences dans des contextes anglo-saxons, comme en Ontario (Canada) à l’université de Waterloo par exemple, au sein de laquelle plus de 25 000 étudiants réalisent un apprentissage à l’étranger chaque année. Cela prépare à travailler dans des environnements très différents, permet de développer un capital mobilité, de renforcer l’insertion professionnelle, de développer des compétences comme la communication et une meilleure confiance en soi.

La loi du 27 décembre 2023 facilite les conditions de mobilité des apprentis en Europe, du point de vue de la durée de l’expérience, des procédures administratives, du financement et de la protection sociale. Elle poursuit l’obligation de disposer d’un référent mobilité internationale au sein des centres de formation.

Pour les organisations d’accueil d’apprentis (les entreprises par exemple), favoriser le développement de la mobilité internationale des apprentis leur permettrait de piloter leurs futurs recrutements de ressources hautement formées et prêtes à travailler, car expérimentées dans différents contextes internationaux, et de mettre en avant une Responsabilité sociétale associée au développement de femmes et d’hommes apprentis à une échelle européenne.

Des enjeux de gestion de ressources humaines

Ces bénéfices pour les participants des dispositifs d’apprentissage sont soumis à des conditions contingentes qu’il demeure nécessaire de connaître. C’est l’objectif d’une recherche-intervention financée dans le cadre du projet MONA (France 2030, Banque des territoires, Euro App Mobility). Intitulée RAMONA, elle mène une expérimentation auprès d’entreprises considérant la mobilité internationale des apprentis comme une innovation sociale.

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En effet, lever les freins légaux et réglementaires n’est qu’un point de départ. La recherche a déjà identifié quatre grands enjeux à en prendre en compte, de manière opérationnelle, afin que les organisations d’accueil puissent développer fortement la mobilité internationale des apprentis :

  • La durée de la mobilité européenne devrait être de deux, voire trois mois minimum, pour permettre une réelle acculturation, un développement des compétences et de comportements organisationnels.

  • La mobilité à l’étranger devrait s’appuyer sur une alternance entre un lieu de formation théorique et un lieu de formation pratique dans la continuité du dispositif d’alternance en France.

  • Le poste de travail vacant pendant la mobilité de l’apprenti devrait être pourvu, idéalement par un apprenti étranger, selon un principe de réciprocité.

  • Il devrait y avoir une prise en compte particulière de l’engagement et du temps d’accompagnement du maître d’apprentissage.

Si le législateur a aidé à lever certains freins, beaucoup reste à faire pour répondre aux enjeux de gestion des ressources humaines présentés ci-dessus. En effet, développer un espace européen de l’apprentissage nécessite de comprendre les impacts de la mobilité sur les différentes parties prenantes d’une part, mais également à l’échelle européenne.The Conversation

Antoine Pennaforte, Maître de conférences HDR en GRH, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.


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