« Être un piano oriental, c’est ouvrir une fenêtre à Paris et s’attendre à voir la mer »...

Le Piano oriental
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À Beyrouth, à la fin des années 50, mon arrière grand- père, Abdallah Chahine, accordeur de piano, pianiste et passionné de musique orientale,
poursuit un rêve : arriver à jouer de la musique orientale sur son piano. Après plusieurs années de recherches, au cours desquelles il démonte puis remonte son instrument plusieurs fois, il finit par mettre au point un piano capable de jouer les quarts de tons de la gamme orientale… sans changer l’aspect de son clavier !
Je n’ai pas connu mon arrière-grand-père, décédé à la veille de la guerre civile libanaise, je l’ai toujours imaginé comme le dernier témoin d’une époque disparue… Mais j’ai connu son piano… Enfant, on me disait «c’est le piano de geddo Abdallah» et ce n’est que plus tard que j’ai compris ce qu’il avait d’exceptionnel.

« Je tricote depuis l’enfance une langue constituée de deux fils fragiles et précieux. »

Bonjour« Qui suis-je ? » écrivait Mahmoud Darwich, «C’est une question que les autres posent. Moi, je suis ma langue.» À Beyrouth, où j’ai grandi, j’ai appris l’arabe en même temps que le français. depuis, l’arabe et le français sont intimement liés en moi. inextricables, l’arabe et le français sont ma langue.
BonjourC’est cette langue double qui me permet de tisser un lien entre mon histoire et celle mon arrière-grand-père, de tendre une passerelle entre ma vie entre la France et le Liban, et le Beyrouth des années 60, celui de cet âge d’or dont ma génération est dépositaire.«Un piano oriental, cette étrange juxtaposition de deux visions du monde que rien ne semble pouvoir lier, cette mélodie double, le son léger du déhanchement inattendu d’une note au milieu d’une phrase… je les porte en moi.»

À l’image de ce piano bilingue, mon identité s’est construite au fil des années, dans un aller-retour constant entre l’arabe et le français.

Zeina Abirached